
Et si ne pas savoir était un atout pour son orientation ?
Dans un monde où l’accumulation d’informations est immédiate et illimitée, l’incertitude semble presque inacceptable. Pourtant, lorsqu’il s’agit d’orientation, ne pas savoir immédiatement où l’on va peut être une véritable opportunité. Loin d’être un handicap, cette période d’exploration et de tâtonnements permet de mieux se connaître, d’expérimenter et d’affiner progressivement ses choix.
Les professionnels de l’orientation le constatent chaque jour : la pression du choix pèse lourdement sur les jeunes. 92% des lycéens déclarent ressentir du stress face à leur avenir* et près de 40% des étudiants en première année de licence envisagent une réorientation.
Trois grandes sources de blocage reviennent régulièrement :
- L’illusion de l’exhaustivité de l’information
Léa, 17 ans, en terminale, passe des heures à explorer les plateformes d’orientation, à lire des témoignages et à analyser les classements des écoles. Elle crée des tableaux comparatifs, liste les avantages et inconvénients de chaque parcours, mais plus elle accumule d’informations, plus elle doute. « Et si je me trompais ? Et si une autre voie était meilleure ? » Résultat : elle n’ose pas postuler et repousse constamment ses choix, paralysée par la peur de faire le mauvais.
Comme Léa, de nombreux jeunes pensent qu’ils doivent d’abord tout comprendre avant d’agir. Ils se lancent dans une quête interminable d’informations sur les filières, les débouchés, les compétences requises… au risque de se perdre dans un flot d’éléments parfois contradictoires. Attendre d’avoir une vision exhaustive avant de choisir peut freiner l’élan nécessaire pour se lancer. L’orientation n’est pas un plan parfaitement tracé, mais un itinéraire qui se construit en avançant.
Antoine de Saint-Exupéry : « L’avenir, tu n’as pas à le prévoir, mais à le permettre ».
Il est essentiel de rappeler aux jeunes que l’expérience précède souvent la compréhension. Tester, rencontrer des professionnels, s’engager dans des stages ou des projets permet d’obtenir des repères bien plus concrets que la seule accumulation de données.
- Le piège du FOMO (Fear of Missing Out)
La peur de passer à côté d’une meilleure opportunité paralyse de nombreux jeunes. Ils hésitent, comparent en permanence leur situation à celle des autres et redoutent que chaque choix ferme irrémédiablement une porte. Cette hyper-connexion aux parcours des autres, amplifiée par les réseaux sociaux, accentue la crainte de faire « le mauvais choix ».
Or, dans la réalité, très peu de parcours professionnels sont linéaires. L’important n’est pas de trouver LA bonne voie immédiatement, mais d’apprendre à s’adapter et à tirer parti des expériences pour rebondir.
- Le mythe du job parfait
Enfin, la croyance selon laquelle il existerait un métier idéal, en parfaite adéquation avec ses aspirations et sources d’épanouissement absolu, est un leurre. Cette quête de perfection, nourrie par des injonctions sociales, risque d’aboutir à une insatisfaction chronique et à la peur de s’engager.
L’épanouissement professionnel est une construction progressive. Il ne dépend pas uniquement du métier choisi, mais aussi de la manière dont on s’y investit, de l’environnement de travail et des opportunités qui se présentent en chemin. Nous savons que la quête du job parfait est vaine : aucun métier ne peut combler toutes nos attentes à lui seul. C’est en explorant, en s’adaptant et en développant de nouvelles compétences que l’on construit progressivement un équilibre professionnel et personnel.
Le rôle des professionnels de l’orientation n’est donc pas de donner des réponses toutes faites, mais d’aider les jeunes à apprivoiser cette incertitude. Encourager la curiosité, la prise d’initiative et l’expérimentation est essentiel pour leur permettre de transformer leurs doutes en moteur d’action.
Face à un avenir de plus en plus imprévisible, ce n’est pas la certitude qui fait la différence, mais la capacité à apprendre et à s’adapter. Ne pas savoir immédiatement où l’on va, c’est souvent le premier pas vers une orientation réussie.
*Sources : Enquête Ipsos 2022 sur l’orientation des jeunes ; Observatoire des trajectoires professionnelles 2023